Comme la plupart des gens, quand j’ai découvert New York, j’ai été enchantée, émerveillée, emballée. Pourquoi un tel enthousiasme ? Cette ville dégage un étonnant sentiment de familiarité alors même qu’on n’y avait auparavant jamais mis les pieds. Les séries télé, les films tournés à NYC, la profusion d’images prises dans cette ville, la musique qu’elle inspire, les romans qui s’y déroulent, nourrissent l’imaginaire d’une bonne partie de la planète. Mais il n’y a pas que cela. New York est une ville « sans nationalité » tant elle abrite d’habitants venus du monde entier. A New York, nous ne sommes plus français, chinois, italien, indien, etc. Nous sommes une personne, avec une histoire écrite au fil des cultures rencontrées par les générations d’hier et d’aujourd’hui.
PORTRAIT explore ces géographies intérieures, qu’elles se construisent à New York avec Jean-Baptiste Michel, explorateur digital installé à Brooklyn, ou Thomas Pynchon, écrivain énigmatique résidant dans le chic Upper West Side de la ville, en Palestine avec Elias Sanbar ou en Tunisie avec Henriette Walter. Mais, quel que soit l’endroit de la planète où l’on se trouve, « On peut, comme le dit Eva Bester, productrice de remèdes à la mélancolie sur France Inter, changer de vie, s’élever par la culture, les arts et casser la gueule au déterminisme”.
Rachèle Bevilacqua.
Quand je m’installe à Los Angeles, en septembre 2007, je suis obsédé par Romain Gary. L’auteur des Racines du ciel vécut “les plus belles années de sa vie” en Californie. Ses écrits ont donné un sens à mon rêve américain, son expérience de consul de France dans cette ville a interrogé la mienne d’attaché culturel. Gary est quasiment devenu mon confident.
Par Yann Perreau. Illustration d’Éloïse Oddos.
Nathalie Gosselin, neurospychologue, mène des recherches sur l’influence de la musique sur le cerveau. Julie Bonnie, musicienne et écrivaine, a essayé de comprendre l’alchimie qui existe entre des notes et des neurones. L’ image qu’elle dessine de cette réalité n’est qu’une esquisse, mais elle est déjà étonnante.
Par Julie Bonnie. Illustrations Adrien Parlange.
Eva Bester produit l’émission Remède à la mélancolie sur France Inter.
En l’écoutant, on est saisi par son enthousiasme pour les livres, les films ou la peinture. La culture est son remède, et celui de ses invités, à la mélancolie. La culture provoque le bonheur, elle agit comme un moyen de transmission et un instrument de paix individuelle et sociale. Portrait d’une grande curieuse en quête de beauté.
Par Rachèle Bevilacqua. Photos Agnès Audras.
Polytechnique et Harvard, le parcours de Jean-Baptiste Michel est impressionnant mais dans son genre classique. Ce qui distingue ce jeune homme est sa perception du monde et sa curiosité pour le comprendre. La vie conduit ce mathématicien-biologiste passionné d’évolution à travailler sur celle de la culture, un domaine dans lequel elle n’a jamais été étudiée.
Et pour cause, il n’existait pas d’instruments de mesure avant l’arrivée de Google. Jean-Baptiste Michel fouille cet entrepôt exponentiel de textes numérisés pour mieux comprendre le comportement humain et l’origine des tendances culturelles.
Par Kiki Denis. Traduit de l’anglais par Marc Frohwirth. Photos de Lindsay Morris.
Sebastian Zimmermann est psychiatre et photographe. Durant treize années, il s’est rendu chez ses consoeurs et confrères new-yorkais pour les prendre en photo sur leur lieu de travail. Un espace, tenu à l’abri des regards, un espace rare où il est possible de penser sa vie. Portrait d’un homme qui aime regarder.
Par Rachèle Bevilacqua.
La communauté queer défend l’idée selon laquelle le sexe ne détermine pas l’identité et le genre. Il est un champ d’exploration du soi. Molly Landreth, photographe, a saisi l’essence de cette culture à travers soixante-dix portraits.
Rencontre avec Travis, Adrien, Ashley et Stella Rose.
Par Élisa Thévenet. Photos Molly Landreth.
Tobie Nathan est ethnopsychiatre. Son travail de thérapeute se situe aux confins de la psychanalyse et de l’anthropologie. Depuis quarante ans, il essaie de remonter le fil de l’histoire de ses patients, de mettre des mots sur les forces qui les traversent au regard de leurs cultures. Tobie Nathan travaille avec les mots. Et pour ce faire, il les étudie.
Par Rachèle Bevilacqua. Photo Stéphanie Dupont.
Sophie Divry vient de publier La Condition pavillonnaire, son troisième roman, pour lequel elle a reçu la mention spéciale du jury du prix Wepler. Cette jeune auteure observe, non sans humour, les arrangements que l’individu met en place pour se fondre dans les codes sociaux. Mais, la plupart du temps, il finit par déraper. Avec Cocaïne, elle suit deux amis qui veulent jouer avec plus
gros qu’eux et se voient renvoyés à leur condition…
Illustrations de Jérémie Claeys.
À qui appartient une ville ? Cette question a traversé le long voyage que j’ai entrepris cet été de Berlin à Leh, Ladakh, en passant par Istanbul. Je cherchais des personnes qui, comme moi, auraient choisi de s’extraire de leur vie, de leur famille, ermites et Robinsons Crusoé à la fois. Raté. J’ai croisé
des personnes très attachées à leur ville comme si leur cité jouait un rôle déterminant dans leur identité. Ces villes sont des villes caméléons, des Babels perchées sur l’eau ou sur des pics de montagne. La question du vivre ensemble se pose avec intensité mais finit par se résoudre d’elle-même.
C’est dans ce miracle et ce mystère que je veux continuer à voyager.
Elias Sanbar est né en Palestine en 1947. Un an plus tard, son pays natal devient Israël, et sa famille fuit au Liban. Homme de lettres et amoureux de la vie, cet historien a déjoué les sentiments de colère et de frustration en se battant pour l’instauration d’une Palestine telle que le droit international l’a définie, ne perdant jamais de vue son objectif : la paix. Aujourd’hui, Elias Sanbar est ambassadeur, observateur permament de la Palestine auprès de l’Unesco.
Par Alexandra Schwartzbrod. Photos Paolo Bevilacqua.
Parce que les codes du théâtre libèrent quand ceux de Henriette Walter, présidente de la Société internationale de linguistique fonctionnelle, est devenue linguiste par le hasard des rencontres. Co-auteure du premier dictionnaire au monde à avoir considéré la langue dans son usage réel, cette octogénaire fringante continue de transmettre son gai savoir au fil de conférences toujours combles.
Par Laure Albernhe. Photos Françoise Huguier.
Comment dépeindre quelqu’un qui ne veut pas qu’on lui tire le portrait ? Que raconter de l’auteur américain Thomas Pynchon, qui refuse depuis toujours de s’adresser aux médias ? Nicolas Richard, son traducteur pour Vice caché, paru en 2010, et Fonds perdus, en 2014, a longtemps pensé que son œuvre se suffisait à elle-même, jusqu’au jour où il a voulu en savoir plus…
Par Nicolas Richard.
Ce que nous aimons dans la rencontre, c’est nous faire surprendre. Nous partons avec quelques idées, des clichés peut-être. En face de nous, une personne qui nous intéresse. Nous avons envie de connaître sa vie et peut être de faire partager son expérience. Elle parle et quand elle explose notre scénario, nous sommes bousculés. L’histoire n’est plus à nous deux. Elle est à nous trois. Nous avons ce désir de rencontrer l’autre, d’apprendre de l’autre. D’avancer. C’est l’école de l’autre.